Le texte intégral de l'Edit d'expulsion des juifs d'Espagne Don Fernand et dona Isabelle, par la grâce de Dieu, roi et reine de Castille, de Léon, d'Aragon, de Sicile, de Grenade, etc... Au prince Don Juan, notre très cher et très aimé fils, et aux enfants, prélats, ducs, marquis, comtes, maîtres des ordres, etc... ,salut et grâce! Sachez que nous avons été informés qu'il existe et qu'il existait dans nos royaumes de mauvais chrétiens qui judaïsait de notre sainte foi catholique, et certes très préjudiciable pour les chrétiens que cette communication avec les juifs. Déjà dans les cortès que nous avons tenues l'année dernière à Tolède, nous avions ordonné d'accorder aux juifs des juiveries dans toutes les villes où ils pussent vivre dans leur péché. En outre, nous avions ordonné d'établir dans nos royaumes et seigneuries d'Inquisition, laquelle existe, vous le savez, depuis douze ans, durant lesquels elle a trouvé beaucoup de coupables, ainsi que nous en avons été informés par les inquisiteurs et par d'autres personnes religieuses, qui par leurs relations, leurs entretiens et leur communication avec les juifs, se sont laissés entrîner par ces derniers. Ceux-ci usent de plusieurs moyens et manières pour soustraire les fidèles à notre sainte foi catholique et les instruire dans leur dangereuse croyance et les cérémonies de leur loi (la loi juive), les invitant à des réunions où ils leur expliquent les fêtes juives qu'il est d'usage d'observer, essayant de les circoncire eux et leurs enfants, leur donnant des livres de prières, les avertissant des jeûnes importants, leur enseignants à transcrire des copies de la Loi, leur annonçant les Pâquesavant qu'elles arrivent, leur expliquant la façon de les célébrer et de les faire, leur donnant et leur portant de leur pains azymes et de leurs viandes égorgées suivant leur rites, les mettant en garde contre les choses prohibées par leur loi, les persuadant de la supériorité de la Loi de Moïse, leur expliquant qu'il n'y a point d'autre loi, ni d'autre vérité que celle-là, ce qui porte préjudice, détriment et opprobre à notre sainte foi catholique. Pour obvier et remédier à cet état de choses, pour faire cesser cette opprobre et cette offense à la religion catholique, nous avons convoqué en conseil les prélats, les grands et les chevaliers de nos royaumes et autres personnes de science et conscience. Après mûre délibération, nous ordonnons de renvoyer de nos royaumes tous les juifs, et que jamais ils n'y reviennent. C'est pourquoi, par le présent édit, nous ordonnons à tous les juids ou juives, quel que soit leur âge, qui vivent, demeurent et sont dans nos royaumes et seigneuries sus-mentionnés d'en sortir au plus tard jusqu'à la fin de juillet prochain de l'année courante, eux, leurs fils et leurs filles, serviteurs, servantes et familiers juifs, petits et grands, quel que soit leur âge. Il ne leur sera pas permis de revenir dans nos Etats, soit délibérément, soit de passage, soit de n'importe quelle manière. En cas de contravention au présent édit, si l'on trouve des juiffs dans nos royaumes, au cas où ils reviendraient d'une manière quelconque, ils encourront la peine de mort et la confiscation de tous leurs biens pour notre chambre de fisc. Nous mandons et ordonnons qu'aucun, ni personne dans nos royaumes sus-mentionnés, quelles que soient sa condition et sa dignité, n'ait l'audace de recevoir, ni reçoive, ni accueille, ni défende publiquement ni secrètement juif et juive, passé la date de fin de juillet et au-delà, à jamais, à perpétuité dans ses terres ni dans ses maisons, ni sur aucun point des susdits royaumes et seigneuries. Toute contravention à cet ordre entraînera pour le coupable la perte de tous ses biens, vaisseaux, forteresses et autres héritages. Et que pour lesdits juifs puissent prendre
leurs mesures durant le délai qui leur est accordé
jusqu'à la fin de juillet, nous leur accordons dès
à présent notre protection royale à eux
et à leurs biens pour que, durant cet intervalle et jusqu'au
jour fixé, ils puissent vaquer à leurs affaires
en toute sécurité, vendre, échanger et se
défaire de tous leurs biens, meubles et immeubles et en
disposer à leur volonté. Enfin, nous ordonnons à tous ceux dont on aura requis les services de la faire, sous peine d'être traduits devant notre cour dans les quinze premiers jours et d'encourir la peine sus-mentionné. Tout écrivain public invité à témoigner en cas de contravention à nos ordres le fera sous son seing privé, de la sorte nous saurons comment nos ordres sont exécutés. Fait dans la ville de Grenade, le trente et unième jour du mois de mars, l'an mil quatre cent quatre-vingt-douze de N.-S. Jésus-Christ. |
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